Racontez nous un peu votre parcours ?
J’ai commencé par faire l’école de Blanche Salant basée sur la méthode américaine : Actor Studio.
Avant ça, j’avais fait un petit parcours chez Michel Galabru donc je suis vraiment née du théâtre et plus particulièrement de cette méthode basée sur la mémoire sensorielle. Elle est intéressante parce qu’il y a énormément de travail qui se fait en amont sur la vie sensorielle du personnage et du coup, lorsqu’on arrive sur scène on peut complètement se libérer l’esprit et laisser vraiment aller notre corps au sens. C’est beaucoup plus évident, beaucoup plus facile et je trouve que c’est un travail qui est plus intéressant parce qu’on construit un personnage en amont mais on ne triche pas, on ne ment jamais car on se laisse porter par la vie sensorielle du personnage dès qu’on est sur scène.
Après cette formation j’ai fait un peu de théâtre. J’ai aussi fait un peu de télé de façon très alimentaire. J’ai eu la chance de faire pas mal de publicité donc financièrement ça m’a permis de pouvoir accepter des projets de théâtre où je gagnais moins ma vie.
Un jour j’ai fait une pub qui m’a rapporté pas mal d’argent et plutôt que de la dilapider dans des soirées avec des potes et sans en voir le bénéfice dans ma vie, j’ai décidé d’en faire quelque chose d’intéressant et de positif.
Je suis donc partie à New York pendant six mois où je me suis inscrite à l’Actor Studio et je prenais des cours d’anglais à la fac. J’ai aussi pris des cours de claquettes sur Broadway.
Là-bas j’ai eu la chance de travailler sur la pièce « Cowboy Mouth » de Sam Shepard et Patti Smith. Pour des raisons très personnelles dans mon parcours de femme et dans mon parcours d’artiste, j’ai retrouvé énormément de raisonnances dans cette pièce.
En rentrant j’ai eu envie de la monter et ça m’a pris cinq ans.
Pouvez-vous nous présenter la pièce « Cowboy Mouth » dans laquelle vous jouez avec Cali en ce moment ?
C’est l’histoire d’amour de Cavale et Slim qui est le reflet de celle de Patti Smith et Sam Shepard. On est en 1971, ils se rencontrent et vivent leur histoire de façon très passionnelle et quelque part ils s’offrent une porte de sortie l’un et l’autre en écrivant cette pièce de théâtre. Ils y jettent toute leur histoire d’amour et ils mettent un point d’honneur à se faire le reflet de toute cette génération des années 70 qui est en perte de repère et qui n’arrive plus à s’accrocher à rien, ni à la politique, ni à la religion pour essayer de trouver un sens à leurs vie.
Le rock et quelques années après, la période punk allait naître de cette époque là. C’est à travers la musique que la jeune génération va trouver un nouveau sens à l’existence. C’est ce que raconte cette pièce.
Cavale kidnappe Slim dans la rue pour faire de lui une star du rock pour essayer de sauver toute cette génération perdue et redonner de l’espoir et un sens à l’avenir. Elle l’enferme au Chelsea Hotel à New York, qui est un des personnages essentiel de la pièce.
Vous aimeriez que les gens se disent quoi après avoir vu la pièce ?
Quand on a la chance de rencontrer les gens à la sortie ils nous disent que ça reste quelque chose de très sensoriel pour eux, ils n’arrivent pas forcément à mettre des mots dessus et en même temps ils savent qu’ils viennent de passer un voyage extra ordinaire. Je veux dire par là qu’on les a vraiment sorti de leur quotidien et en même temps ils se sont connectés comme jamais à ce qu’ils ont de plus essentiel en eux. Peut-être que ça les a chamboulé parce qu’ils se sont confrontés à des questions qu’ils ne se posaient plus. Je pense que ça réveil chez eux des choses de l’ordre de l’intime.
Je crois que même si ce sont deux personnages extrêmement désespérés il y a quelque chose d’extrêmement lumineux à la sortie de cette pièce, c’est plein d’espoir.
Ce qui me plait le plus c’est quand les gens acceptent de lâcher prise, ce qui leur prix 10/15 minutes mais après ce moment ils plongent tête baissée dans cette aventure, dans ce couple, dans cette histoire et ils ressortent de là avec plein de très beaux souvenirs.
Ce qui est bien c’est que chacun d’entre eux nous dit que cette pièce qui ne les quittera pas pendant quelques jours et qu’elle va continuer à mûrir et qu’elle va leur faire toucher du doigt des choses assez fortes.
Pourquoi avoir choisi Cali pour vous accompagner sur scène dans la pièce « Cowboy Mouth » ?
Au fur et à mesure de mes recherches, je me suis rendu compte que la dimension musicale était telle qu’il fallait vraiment que je puisse avoir à mes côtés un partenaire de jeu qui est une connexion totale, immédiate et instinctive à cet univers là. Je me suis dis que ça allait être un support énorme pour moi, d’avoir à mes coté quelqu’un pour qui la musique était un sixième sens.
J’avais toute la dimension onirique du personnage je l’avais totalement saisi, après toute celle du pouvoir de la musique à cette époque là il y a quelque chose qui m’échappait et même si j’en m’en étais imprégnée à travers beaucoup de lecture, je savais qu’il me fallait quelqu’un pour qui la musique était aussi essentielle que pour les personnages.
C’est Benabar qui m’a dit : « l’univers rock est tellement puissant qu’il te faut quelqu’un pour qui toutes ses évidences là, tous ses mots, tout ce combat, soit essentiel » et il m’a dit que Cali faisait de la musique pour toutes ses raisons. Il m’a dit que lorsqu’il écoutait le texte il avait l’impression de l’entendre parler et il m’a conseillé de lui proposer.
Je lui ai envoyé un samedi et le dimanche il m’a envoyé un mail en me disant de ne surtout pas faire cette pièce sans lui ! C’était génial, j’étais ravie et en même temps j’avais la trouille car je me demandais ce que ça pourrait donner car il n’avait jamais fait de théâtre.
Dès notre première rencontre, après avoir dîné, j’ai su que c’était le personnage dans sa façon de s’exprimer, dans ses inspirations… Tout était dans la pièce déjà.
Comment avez vous réussi à créer une telle fusion entre vous alors que vous ne vous connaissiez pas ?
Patti Smith et Sam Shepard ont une telle complicité qui eus due à l’heure histoire d’amour, qu’effectivement il était essentiel qu’on est cette complicité là. Il est vrai qu’elle est venue de façon assez évidente. On s’est beaucoup vu, il m’a beaucoup parlé et indiqué pas mal de lectures, ce qui nous a beaucoup rapproché. Les mots étaient tellement évident pour nous, que rapidement on s’est retrouvé là dedans.
Cali nous a confié qu’il pensait que le fait d’avoir eu plus de temps comme il était en tournée avait été un plus pour la pièce. Etes vous du même avis ?
Oui parce que je pense que nous n’aurions pas été prêts. On l’aurait fait mais ça fait trois ans maintenant que Cali est rentré dans le projet et je pense que c’était nécessaire, autant pour lui que pour moi qu’on digère les personnages.
Quand il était en tournée il médisait régulièrement qu’il relisait le texte, qu’il avait compris des choses et qu’il était touché d’avoir touché du doigt des choses essentiels. On était souvent passé à coté de certains trucs.
C’est un texte tellement sensoriel et tellement instinctif que je pense que le travail se fait dans l’inconscient. Donc ces cinq années pour moi et les trois pour Bruno (Cali NDLR) étaient essentielles.
Quels sont vos coups de coeur au théâtre en ce moment ?
Une pièce qu’il faut absolument aller voir c’est « Mangez-le si vous voulez » au théâtre Tristan Bernard, qui est au 64, rue du Rocher dans le VIIIème à Paris. J’aime les pièces qui nous chamboulent et qui nous faut nous poser les bonnes questions et elle fait partie de ses pièces là.
Si vous deviez nous citer, un parfum, un homme, une femme, une ville, un objet et une devise ?
Un parfum : Le jasmin parce que ça berce mon enfance. Mon père en a toujours mis dans le jardin et quand je sens du jasmin j’ai une boule d’émotion qui monte.
Un homme : Bruno (Cali), tellement évident…
Une femme : Annie Girardot et ça plus que jamais.
Une ville : La mienne est plus précisément ma presque ile, le Cap Feret.
Un objet : Cali m’a inspiré pour cette réponse. J’ai hérité de pas mal de choses de mon grand-père que je n’ai malheureusement pas connu. Il est mort en en résistant à la guerre et j’ai gardé son laissé passer donc ce serait ça.
Une devise : « Marche ou crève. »
Vos bons plans et vos bonnes adresses ?
Le Barbe à Papa qui est au 18 Rue Condorcet dans le IX ème à Paris. C’est le restaurant le plus sympa que je puisse connaitre. C’est convivial, la nourriture est top et à chaque qu’il s vous emmènent l’addition c’est avec des bocaux énormes de bonbons ! On se croirait à la maison !
Quels sont vos projets et vos envies ?
Vivre le moment présent. On est à l’affiche jusqu’au 26 avril et je verrai après.